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L'Etat et la Région en soutien aux boues rouges toxiques

LE PRÉFET ET LE PRÉSIDENT DE LA RÉGION PROVENCE-ALPES-COTE D’AZUR APPORTENT LEUR SOUTIEN À LA POURSUITE DE LA POLLUTION ET À LA DISSÉMINATION DES BOUES ROUGES TOXIQUES

Dans un courrier, le Préfet et le Président du Conseil Régional de Provence-Alpes-Côte d’Azur volent au secours d’Alteo en annonçant un soutien de l’Etat et de la Région de plusieurs millions d’euros d’argent public à destination d’un repreneur privé. La contrepartie demandée : poursuivre la pollution en mer et à terre par les boues rouges et disséminer celles-ci par une valorisation dangereuse de ces déchets toxiques au détriment de la santé et de l’environnement.

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L’usine de Gardanne, en redressement judiciaire, est sur le point d’être rachetée

La procédure de redressement judiciaire de l’usine Alteo de Gardanne qui dure depuis un an devrait connaître son épilogue avec le choix d’un repreneur par le Tribunal de Commerce de Marseille le 8 décembre prochain. Deux offres de reprise sont encore en lice : celle d’Alto portée par un ancien cadre d’Alteo, Xavier Perrier et celle d’UMS (United Mining Supply), conglomérat minier guinéen à capitaux chinois et singapouriens, dont le siège est dans un paradis fiscal et qui est gérée par un proche d’Alpha Condé, Président guinéen, autocrate récemment réélu pour un troisième mandat illégal.

La différence entre ces deux offres, outre le côté sulfureux de la candidature d’UMS, réside dans la stratégie retenue concernant les rejets toxiques de la transformation de bauxite : le maintien de cette activité pour Alto, poursuivant le stockage de 350 000 tonnes par an de boues rouges à terre sur le collines de Mangegarri (Bouc Bel Air) et le rejet de millions de m3 de résidus liquides chargés d’arsenic et de métaux lourds en mer, ou le transfert de cette activité en Guinée pour UMS, pays moins regardant que la France sur les impacts environnementaux (dixit l’offre de reprise d’UMS) et la santé.

L’Etat et la Région Provence-Alpes Côte d’Azur soutiennent la poursuite de la pollution

La première option semble avoir la préférence de l’Etat et de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, puisque, contrairement à ce que le Ministère de la Transition écologique nous a affirmé en octobre, ils font pression sur les administrateurs pour qu’ils aillent dans ce sens.

Dans un courrier envoyé le 24 septembre (annexe 1), Christophe Mirmand et Renaud Muselier, préfet et Président de la Région Provence-Alpes Côte d’Azur ont « indiqué (aux administrateurs) qu’il (leur) semble impératif de tout mettre en œuvre pour trouver une solution qui préserve l’ensemble de l’activité de l’entreprise, de l’amont à l’aval ».
Ils s’engagent pour cela à apporter plusieurs millions d’euros au repreneur.

Vers une pollution circulaire et un prochain scandale sanitaire ?

Ce soutien porte sur une « solution miracle » pour se débarrasser de la pollution des boues rouges mise en avant depuis le rachat de l’usine de Gardanne par le fond d’investissement américain HIG en 2012 : la valorisation des boues rouges déshydratées renommées « bauxaline ».

C’est déjà grâce à une aide publique de 15 millions d’euros de l’Agence de l’eau qu’Alteo avait fait construire trois « filtres-presse » pour déshydrater les boues rouges. Mais à part la couverture de décharge, cette « bauxaline » n’a pas trouvé beaucoup de client.

C’est pourtant cette solution qui est soutenue par Christophe Mirmand et Renaud Muselier. Soucieux de « réduire de manière continue l’empreinte environnementale » de l’usine, ils affirment que « la valorisation de la bauxaline permettant de limiter l’impact sur le site de Mangegarri est ainsi un enjeu majeur »

Pour cela, il s’engagent à apporter 2 millions d’euros pour soutenir un démonstrateur de valorisation des boues rouges déshydratées plus un soutien à un autre projet dont l’investissement s’élève à 25 millions d’euros.

Ainsi, ce sont 350 000 tonnes par an de boues chargées d’arsenic, de métaux lourds et avec une radioactivité naturelle renforcée qui pourraient être « revalorisées » sous différentes applications. Cela reviendrait à diluer et diffuser un déchet dangereux et en perdre la traçabilité.

Limiter l’impact environnemental (enfin reconnu !) sur le site de Mangegarri et les conséquences sanitaires sur les riverains justifierait-il de disséminer ces déchets toxiques sur tout le territoire grâce à l’argent public ?

Vérité dans les Landes, mensonges en PACA ?

Une première tentative de dissémination des boues rouges déshydratées a déjà été bloquée en décembre 2018 par l’Association ZEA (annexe 2).

Alertée par un transporteur, l’association avait dénoncé l’exportation de plusieurs dizaines de milliers de tonnes de Bauxaline sur le port de Bayonne. Ce projet de « dépollution » de déchets d’acierie stockés sur le port par son mélange avec les boues rouges de l’usine de Gardanne (dilution des teneurs en polluants à la tonne pour respecter les normes et pouvoir les utiliser comme matériau de terrassement) avait finalement été interdit par un arrêté du Préfet des Landes.

Celui-ci avait reconnu que les boues rouges étaient un déchet, dont la radioactivité avait déclenché les portiques de sécurité sur le port de Bayonne, et qu’il mettait en demeure Alteo de les récupérer.

Faut-il croire le représentant de l’Etat en PACA ou celui des Landes ?

Un projet de transition, validé par un Ministre, est sur la table du Président de la Région

Accusée constamment d’être uniquement des empêcheurs de faire de la croissance et de créer de l’emploi, l’association ZEA a travaillé sur un projet de transition du site pollué de Mangegarri.

Plutôt que de se débarrasser des déchets toxiques en les disséminant, l’urgence est de sécuriser le site, de le rendre étanche pour empêcher la pollution des eaux souterraines, et de le couvrir pour stopper les envols de poussières chargées de métaux lourds qui mettent en danger la santé des riverains.

Une fois ce chantier effectué, il sera possible d’y implanter une centrale photovoltaïque, activité rentable et créatrice d’emplois. Plutôt que de « coûter » de l’argent public, cette centrale rapporterait aux collectivités.

Présenté à Nicolas Hulot et à ses services lorsqu’il était Ministre de la transition écologique et solidaire, il a apporté son soutien à ce projet.

Monsieur Muselier a reçu le dossier de transition, mais plutôt que d’avoir le courage politique d’acter que l’usine de Gardanne est une usine du passé, il préfère suivre une solution miracle et dépenser de l’argent public pour transformer la boue en or.